Suisse : retour par le Jura
Prendre conscience de ce que l’on a et en profiter pleinement...
En route pour la dernière ligne droite
L’attente pour la pièce de rechange a été plus longue que prévue. On a douté de pouvoir rallier la Suisse et notre maison à
temps car nous souhaitons vraiment arriver un dimanche afin que nos proches qui ne sont pas en vacances puissent être
présents. En faisant des étapes plus intenses et si aucune autre mésaventure matérielle ne survient, on peut y arriver.
La première étape part de Mittelhausen et rejoint Mulhouse : 136 km à plat. Une étape qui nous fait longer un canal avant de
traverser des régions remplies de maïs. Les champs sont arrosés par des machines automatiques et l’aspersion déborde
largement sur la voie cyclable. Du coup, nous observons le sens des jets et calculons le temps nécessaire pour soit pédaler
très vite, soit attendre que les jets se tournent ailleurs afin de ne pas être complètement trempés.
Le lendemain c’est sur une jolie route bien agréable que nous débutons la journée et ça monte (enfin). Nous atteignons la
frontière franco-suisse. Olivier est très déçu. Lui qui pensait immortaliser ce moment avec une photo en compagnie des
douaniers... il va vite déchanter. Ce sont les drapeaux français qui nous indiquent que nous y sommes et c’est tout. Aucun
bâtiment, aucun contrôle. On doute même au départ d’être arrivé en Suisse. Ce sont les plaques des voitures parquées
devant les quelques maisons qui se trouvent un peu plus loin qui nous confirment que ça y est, nous y sommes. Les enfants
sont contents.
Nous pédalons encore quelques kilomètres avant de nous arrêter dans le premier village, pour y pique-niquer sur la place
de la fontaine.
Nous continuons en direction de Sainte-Ursanne puis arrivons à Saignelégier, après une huitantaine de kilomètres. Nous y
passons la nuit.
Le lendemain, comme il pleut le matin, nous tardons à partir et nous quittons Saignelégier vers midi. Nous avons l’intention
de rejoindre Neuchâtel pour y dormir chez Nicole et Gaëtan, 2 Warmshowers qui ont voyagé en Asie et qui comptent y
retourner dans 6 mois. Nous roulons entre les gouttes. Peu de temps après le départ, nous recevons un appel de Louis qui
nous demande où nous allons dormir. Il a prévu nous rejoindre pour la nuit avec Ursula. Nous entendons la voix de Carine
en arrière fond. Nous pensions qu’elle était déjà partie en vacances mais non, elle part à 3h du matin pour prendre son
avion et tient à passer la soirée avec nous. Ni une, ni deux, nous appelons les Warmshowers (nous n’aimons vraiment pas
décommander à la dernière minute) qui comprennent très bien. Ils nous rejoindront d’ailleurs le soir au camping et nous
passerons un chouette moment.
Nous poursuivons notre route et atteignons “la vue des Alpes”. Mais... on n’y voit rien ! On aurait bien apprécié pouvoir avoir
cette vue mais c’est ainsi, on s’en amuse. Nous prenons tout de même le temps de pique-niquer avant d’attaquer la
descente de fous vers le lac de Neuchâtel.
Avant de redémarrer, on s’équipe, il va faire froid. Le brouillard bouche tout et comme nous avons un bon moment de
descente, on se protège du froid. Très vite, la route devient dangereuse car le brouillard est très épais. Nous n’avons pas
nos phares (restés dans le paquet de Bangkok qui n’est pas arrivé). Difficile donc de bien se faire voir par les véhicules qui
arrivent derrière nous. En arrivant en bas, nous quittons le brouillard puis, après une jolie petite montée, nous redescendons
sur Neuchâtel et atteignons le bord du lac où nous nous arrêtons un moment.
Nous rejoignons le camping après environ 5 kilomètres et au moment où nous y entrons, les enfants aperçoivent une voiture
qu’ils connaissent. Retrouvailles émotionnellement intenses avec Carine, Ursula, Amador et Louis. Très rapidement, nous
faisons la connaissance de Nicole et Gaëtan. Nous posons nos vélos et allons nous installer à la terrasse. La pluie arrive.
Les Girard ont organisé le souper : fondue au menu ! Une bâche est installée afin de nous mettre à l’abri et nous dégustons
cette première fondue dans une chouette ambiance de retrouvailles.
Vers 23h, Carine et Amador nous quittent et quelques temps après, nous allons nous coucher, pour cette dernière nuit du
voyage. Nous sommes le 1er août et une soirée musicale bat plein tubes (avec un style qui ressemble plus à du bruit qu’à
de la musique à notre goût). Et ça dure... jusqu’à 4h du matin ! Malgré les boules Quiès (que j’utilise pour la 1ère fois de
l’année), la nuit est certainement la moins reposante de tout le voyage...
Neuchâtel - Billens : dernière étape
Le déjeuner est bien agréable. Nous paquetons tout notre matériel pour la dernière fois. Ressenti étrange. On n’y réfléchit
pas trop. Puis départ. Cette étape se fait sous un soleil radieux toujours sur des routes très peu empruntées. Nous pique-
niquons à Payerne, puis poursuivons. Lors d’un long bout droit, en légère descente, nous observons au loin 2 personnes qui
se tiennent au milieu de la route. En approchant, on les observe, et on remarque qu’ils sont en fait 3, une petite dans les
bras. Ils n’avancent pas, ce ne sont donc pas des promeneurs. On s’approche, on imagine des tas de choses, ils nous font
signe, et oui, ce sont bien eux ! Virgin’, Amandine et Christophe nous accueillent avec leur vélo et la charrette pour
Amandine. Ils nous attendent à un chouette endroit muni d’une jolie petite fontaine. L’émotion est forte. On n’en revient pas.
Les larmes nous sortent des yeux, on sanglote même. On se pose. On réalise. On est trop contents. Après ce moment
magique nous poursuivons la route ensemble, trop trop bien ! On pédale en file de 2, on discute, on se retrouve.
Puis, nous attaquons la dernière montée qui nous mène de Granges-Marnand aux bois de Romont. En route, ce sont Karine
et Gilles qui nous attendent, eux aussi avec leur vélo. Nous avons également peiné à les reconnaître au loin. Ils nous
accompagnent également jusqu’à la maison et ça nous touche. Trop bien.
Nous rencontrons encore du monde sur le chemin, au sommet de la montée, puis en arrivant à Billens. Louis et Liam nous
rejoignent avec le vélomoteur et la charrette, gros rires.
Maxime, Fabienne, Nicole et leur famille nous accueillent devant chez eux. Moment émouvant.
Nous nous arrêtons chez la grand-maman d’Olivier avant de monter chez nous. Elle ne s’y attend pas. Nous avons la bonne
surprise de rencontrer encore d’autres membres de la famille.
Puis, ça y est, cette fois nous y sommes. On poursuit, nous nous rapprochons. Je souhaite arriver par la terrasse afin de me
laisser quelques minutes avant de rejoindre la maison. Nous la voyons et par la même occasion toutes les voitures des
personnes venues nous accueillir.
Dernier virage... On se lance... Nos proches se mettent de chaque côté de la route et nous font une haie d’honneur. On en a
la chair de poule. On avance les larmes aux yeux et on pose le pied à terre. Amalia et Esteban descendent du vélo, viennent
vers nous pour un dernier câlin, on se dit merci avant que la bulle n’éclate. Puis, nous allons rejoindre nos amis et famille.
Comme ça fait du bien qu’ils soient là.
La suite de la soirée se passe dans la détente. Merci Papa pour toute la mise en place, un vrai cadeau ! Merci à vous tous
pour ce moment si intense, tant apprécié. Nous avions besoin de votre présence pour ce retour et ce moment a vraiment été
magique. MERCI. Mitch notre boulanger vient même nous apporter un super déjeuner lors de notre premier matin à la
maison (cuchaule, moutarde de bénichon et pains, trop trop bien).
Nous retombons très vite dans la réalité suisse. Lors des discussions de la fête de retour déjà mais les jours qui suivent
également. Réaménagement de la maison, on doit se ré-apprivoiser avec la vie d’ici. On a tant de choses à faire et de
personnes à revoir que la mélancolie se pointe moins que l’on ne pensait au début. Elle débarque par la suite. Le montage
des films nous attend à présent. Une autre manière de poursuivre cette aventure.
Merci Amalia et Esteban
Voilà un merci que nous souhaitons ne pas oublier. Amalia et Esteban se sont lancés dans cette aventure avec nous les
yeux fermés, ils ont vécu, ressenti au maximum chaque instant qui leur était donné. Par leur manière d’être et de vivre, ils
nous ont facilité la vie dans nos galères... Le partage a été intense. Notre dynamique familiale a évolué c’est certain. Nous
avons appris à nous connaître différemment, dans des aspects que nous n’aurions pas découverts en restant chez nous.
Quelque chose de profond s’est ouvert et c’est dans la sérénité de la connaissance de l’autre que nous pouvons nous
regarder autrement, nous adresser la parole de manière différente.
Amalia et Esteban sont restés ouverts à tout ce qui s’offrait à eux. Ils ont goûté pleinement cette aventure et se sont adaptés
à toutes les nouveautés (bien que la soupe de nouilles, ça commençait à faire beaucoup...). Pour toutes ces raisons et bien
d’autres encore, nous leur en sommes infiniment reconnaissants.
Merci
Il est difficile de se lancer dans des mercis et de n’oublier personne. Tant de gens nous ont tendu la main. Nous pensons à
nos proches (famille et amis), à toutes ces rencontres sur notre chemin qui nous ont montré la grandeur de cette chaleur
humaine. Ils n’ont rien mais ils donnent tout. Et aux lecteurs du site que nous connaissons ou pas et qui nous ont contactés
(vos messages ont vraiment été appréciés).
Nous sommes de retour dans la réalité suisse mais souhaiterions garder des aspects du voyage, des rencontres dans notre
vie ici. Cela commencerait certainement par la spontanéité, oser aller vers l’autre, tenter de ne pas trop hésiter de peur de
déranger... C’est bien suisse ça ! Nous avons voulu une maison ouverte et accueillante, alors n’hésitez pas à passer boire
un verre quand l’idée vous vient à l’esprit, sans crainte de déranger. C’est ça la vie aussi, des rencontres, des moments
partagés, des moments qui bousculent et qui resserrent...
Le travail a repris et nous sommes très motivés et positifs à ce niveau. Nous sommes en plein dans le contrecoup (ou
contre-coût?) du retour. Cette prison dorée nous remplit de spleen. On doit se réajuster et c’est difficile.
C’est comme ces matins où l’on se réveille trop vite et qu’un rêve tant agréable est stoppé net. On tente à tout prix de nous
endormir à nouveau afin de le poursuivre... Ce rêve est réalisé, on doit accepter d’en sortir et laisser place au suivant. Mais
ce n’est pas évident.
Merci la Vie et à la beauté des rêves
Nous terminerons ce récit par ce poème faussement attribué à Pablo Neruda (ou pas, le doute perdure encore), poète
chilien dont les enfants ont tant apprécié la visite de ses maisons :
“Il meurt lentement
celui qui ne voyage pas,
celui qui ne lit pas,
celui qui n'écoute pas de musique,
celui qui ne sait pas trouver
grâce à ses yeux.
Il meurt lentement
celui qui détruit son amour-propre,
celui qui ne se laisse jamais aider.
Il meurt lentement
celui qui devient esclave de l'habitude
refaisant tous les jours les mêmes chemins,
celui qui ne change jamais de repère,
ne se risque jamais à changer la couleur
de ses vêtements
ou qui ne parle jamais à un inconnu
Il meurt lentement
celui qui évite la passion
et son tourbillon d'émotions
celles qui redonnent la lumière dans les yeux
et réparent les coeurs blessés
Il meurt lentement
celui qui ne change pas de cap
lorsqu'il est malheureux
au travail ou en amour,
celui qui ne prend pas de risques
pour réaliser ses rêves,
celui qui, pas une seule fois dans sa vie,
n'a fui les conseils sensés.
Vis maintenant!
Risque-toi aujourd'hui!
Agis tout de suite!
Ne te laisse pas mourir lentement!
Ne te prive pas d'être heureux!”
Se sentir vivant, profiter pleinement de ce que l’on a et en être reconnaissant.